Éprouvante destinée que celle de la chanteuse tsigane Ljiljana Petrovic... Abandonnée peu après sa naissance par son père, elle accompagne sa mère chanteuse lors de ses spectacles dans les cafés et restaurants de Belgrade. Un soir de 1956, âgée d’à peine 12 ans, elle demande au violoniste si elle peut la remplacer : malade, sa mère est en effet incapable de chanter. Rires de l’orchestre, qui pris de pitié devant cette pauvre fille mal fagotée dans une robe trop grande pour elle, la laisse finalement monter sur scène. Elle commence à chanter, et les rires cessent. Grand succès. La carrière de Ljiljana venait de débuter.
Sa mère l’abandonne l’année suivante. Ljiljana continue de chanter dans les cafés et les restaurants adaptant son répertoire à son public : romances gitanes et russes, jazz, musiques traditionnelles des Balkans, classique, country, pop et sevdah (musique traditionnelle de Bosnie Herzegovine)... Elle prend des cours de chant, finit l’école et tombe enceinte à 14 ans.
Elle part à Belgrade et devient célèbre en chantant dans les Kafanas, énormes cafés-restaurants où l’on joue de la musique et enregistre un premier single en 1969. Son style devient plus personnel, reconnaissable par sa voix grave et puissante, noire et mystérieuse...
Elle devient dans les années 70 la mère de l’âme tsigane, l’idole des artistes et des intellectuels yougoslaves, mais enregistre peu (sinon à son insu...), restant volontairement à l’écart du système des studios et préférant chanter dans les bars et dans les fêtes. On l’entend à la radio, elle est invitée à la télévision... Ce sont ses années de gloire.
Et puis au début des années 80, la mode et les gouts changent. Le disco fait son apparition, et aussi le "turbofolk" avec son cortège de synthétiseurs et de rythmes électroniques insipides. Ljiljana chante moins, les Kafanas ferment. Elle part avec ses deux enfants en Allemagne, à Düsseldorf, Ljiljana ne chante plus. Cette période de sa vie est terminée. Elle fait des ménages, travaille à l’usine ou comme serveuse. Elle se remarie et devient Mme Buttler.
Et le miracle se produit une nuit de juin 2000. Dragi Sestic, jeune producteur, écoute par hasard une vieille cassette "bootleg" trouvée dans la maison de ses parents à Mostar. C’est Ljijana. Ému aux larmes par cette voix grave et profonde dans laquelle s’entend toute la souffrance et aussi parfois les joies de l’âme tzigane, il finira à force d’opiniâtreté par retrouver Ljijana et la convaincre d’enregistrer ce magnifique et émouvant album en 2002.
Qu’il en soit mille fois remercié...
1. Ashun daje mori(L. Buttler) 5’26
2. Ja k’o ostala deca (L. Ilijevski) 4’56
3. Zvonija, zvonija (L. Buttler) 4’56
4. Nocas mi srce pati (T. Zdravkovic) 4’21
5. Si, si, si (L. Buttler) 7’34
6. Niska banja (trad.) 4’22
7. Imam jednu zelju (trad.) 5’59
8. Otkako sam tudja zena (L. Buttler) 5’30
9. Chororo (D. Petrovic) 5’36
10. But roma (trad.) 3’17
11. Ciganine sviraj, sviraj (T. Zdravkovic) 5’38
12. Djelem djelem daje (L. Buttler) 6’33
Enregistré au studio Neretva-Music Center Pavarotti- Mostar, Bosnie Herzegovine. Publié en 2002.