Voilà déjà dix ans que Christine Tassan commet ses joyeuses impostures manouches de l’autre côté de l’Atlantique au Québec. Pour son nouveau disque, C’est l’heure de l’apéro, la gracieuse guitariste a fait appel à son équipe habituelle : Lise-Ann Ross à la rythmique, Martine Gaumond au violon et Blanche Baillargeon à la contrebasse. Avec plus de 400 spectacles à son actif et trois disques, la cohésion du groupe n’est plus à faire : ça tourne, cette affaire !
L’ouverture sur le morceau/titre (C’est l’heure de l’apéro) donne bien la tonalité générale l’album : énergie du swing, fantaisie des paroles et de l’interprétation, qualité des arrangements, maitrise instrumentale et efficacité des chorus... tout cela emballé d’un joli son d’ensemble ; on sait qu’on va passer un bon moment en compagnie de ces dames. Le répertoire alterne reprises et créations, chansons et instrumentaux dans un bel équilibre. La contrebasse de Blanche Baillargeon s’impose avec autorité (Délit de fuite, Impromptu) et la solide rythmique de Lise-Ann Ross déroule le tapis aux envolées de Martine Gaumond et de Christine Tassan qui lorgnent vers le blues (Tu me cherches), la bossa manouche façon Rosenberg (Un rom à Cuba dont les chorus ont des accents "stochelien"...) ou la mélancolie de Piazzola (bel arrangement "tsiganisant" de Vuelvo al sur). Mais le fond de commerce, ça reste bien sûr le swing ; l’unique reprise de Django ne manque pas d’audace (Impromptu est loin d’être le thème le plus aisé du maître...) et les tempos élevés n’effraient pas ces demoiselles (Et que ça saute, qui porte bien son nom est l’occasion de belles joutes instrumentales). Les reprises sont toujours de bon goût (touchante Maison sous les arbres de Bécaud) et mettent à l’honneur le talent d’auteur/compositeur du québécois Raymond Lévesque (La vie de Bohème, Quand les hommes vivront d’amour). Enfin, les chansons, souvent très drôles, bénéficient d’arrangements recherchés autant du point de vue instrumental que vocal (on croirait parfois entendre les Andrew Sisters...) : on adore par exemple le traitement quasi-psychotique du Désordre ou les savoureuses transitions en forme d’hommage d’Une étoile pour chaque note, qui conte avec beaucoup d’esprit la vraie fausse histoire de la guitare à Django !
Bref, encore un disque très réussi à mettre entre toutes les oreilles, et comme dirait Couvreux, un quartet attachant qu’on aimerait bien voir à Samois l’année prochaine !
1- C’est l’heure de l’apéro (Christine Tassan)
2- Délit de fuite (Christine Tassan)
3- Tu me cherches (Jean-Pierre Ferland / Jean Hubert Leccia)
4- Et que ça saute (Christine Tassan)
5- La maison sous les arbres (Pierre Delanoë / Gilbert Bécaud)
6- Un rom à Cuba (Christine Tassan)
7- Le désordre (Blanche Baillargeon)
8- Impromptu (Django Reinhardt)
9- Lenteur Tzigane (Christine Tassan)
10- Vuelvo al sur (Astor Piazzola)
11- Une étoile pour chaque note (Guylaine Saint-Pierre / Christine Tassan)
12- La mauresque (Christine Tassan)
13- La vie de bohème (Raymond Lévesque)
14- Quand les hommes vivront d’amour (Raymond Lévesque)
Enregistré au studio Champagne, Quebec.