- Doudou et la nouvelle pochette du CD
" Comme tous les fanas de Django, je connaissais Babik de renom et l'avais plusieurs fois approché au festival de Samois (que je fréquentais depuis 1984). Il finissait les nuits au bar "Chez Fernand" et était toujours très entouré de nombreux musiciens et autres personnalités.
En 97, comme j'œuvrais au sein du groupe de Romane, ils se sont retrouvés à faire le boeuf dans ce café mythique. J'étais à la pompe et on s'est tous donné à mort ; Babik était vraiment enthousiaste du résultat et m'avait félicité sur ce coup là. Coup de pot, c'est à ce moment que Romane et Babik fomentaient l'idée de monter le "New Quintet du Hot Club de France" : le rythmicien était donc tout trouvé pour eux, par contre, ils voulaient une guitare jazz électrique pour ça. Il m'a donc fallu acquérir cette magnifique Dupont que je possède encore aujourd'hui. Elle est toute simple avec un seul micro et un bouton de volume ; Babik en était fou et m'a même proposé de me l'échanger contre sa Gibson 175 : j'ai toujours refusé et ne le regrette pas car aujourd'hui, c'est David, le fils de Babik qui joue légitimement et brillamment sur cette Gibson.
L'enregistrement du disque s'est fait chez Didier Lockwood. Babik doutait toujours de lui-même et ce ne fût pas sans mal et sans heurts que l'album s'est terminé (coups de gueules, arrêt puis reprise de la séance etc...).
- Babik
Je me souviens des restos nocturnes ou l'alcool coulait assez facilement, des rentrées à l'hôtel avec Florin Niculescu et Gilles Naturel, où nous nous raccompagnions l'un-l'autre à nos piaules en zigzaguant dans les couloirs (surtout moi)...Je me souviens de mon émoi lorsque Didier a croisé l'archet avec Florin sur un titre (mélodie pour Stéphane) : l'effet était tellement saisissant que je me suis fait
emporter et me suis perdu dans la grille ; tout le monde s'arrête et se
tourne vers moi...... réaction hilare de Babik observant ma tronche
déconfite !
Le disque s'est conclu par un magnifique dîner chez Didier. Les rares prestations de cet ensemble furent des aventures mémorables : pour un concert sur l'ile de la réunion, il fallait voir Babik et Florin descendant de l'avion après 14h de vol sans fumer, eux qui consommaient entre deux et quatre paquets par jour...
Pour cette occasion, nous étions accueillis comme des rois dans un hôtel avec bungalows. Romane et Babik se sont alors mis en tête de me familiariser au pays : Pour commencer, une bonne cuite aux rhums de tous poils autour du bar de la piscine (24h de casquette à pointe), puis acoutumance à la cuisine locale (le feu dans la bouche pendant deux jours). Babik et moi-même avions devisé sur la manière de gérer la calvitie, lui portant perruque et moi alignant le toutim au rasoir : il m'avait confié son ras-le-bol de mettre cet artifice et passa à l'acte quelques mois plus tard en découvrant une magnifique boule de billard.
Le concert était un moment plutôt difficile à gérer pour Babik ; il
fallait je ne sais quel ingrédient pour que tout s'enroule logiquement
et que la musique décolle. S'il était nerveux, malheur au pauvre
techno-son qui ne lui envoyait pas le son voulu dans les retours. J'ai
un ou deux pitoyables souvenirs d'après concert où je rentrai à l'hôtel
avec une certaine envie de me pendre, m'ayant entendu dire "tu swingues comme un plat de pâtes", ce qui n'était probablement pas faux ces fois là.
Mais lorsque la sauce prenait, il était capable des phrases les plus
lyriques, des soli les plus construits, et je me rends compte aujourd'hui de son talent de compositeur. Florin, Romane et Gilles, qui ne sont pas des rigolos, roulaient des yeux ronds d'admiration lorsqu'il sortait une phrase magique venue d'on ne sait où, c'était divin.
Lors de sa disparition, j'étais en tournée en Norvège avec Florin et le
groupe Latcho Drom. Nous n'avons pas pu nous rendre à ses funérailles mais pendant tout le reste de la tournée nous n'avons joué que pour lui. Il est d'ailleurs possible que de nombreux musiciens fassent de même pendant longtemps. Pour ma part, en dehors de la partie prestigieuse que je peux inscrire sur mon CV, Babik restera un homme dur et tendre à la fois, le souvenir d'un partage intense et humain."