Premier album studio de Tchavolo depuis « 7 gypsy nights » en 2007 ; il faut dire que le guitariste ne donne souvent sa pleine mesure qu’en live (concerts, afters, jam session…). Mais ça valait le coup d’attendre car voilà un très grand cru.
Plusieurs raisons à cela ; tout d’abord l’équipe : Claudius Dupont, contrebasse et Samy Daussat, guitare d’accompagnement, une section rythmique à l’efficacité redoutable qui « accompagne » Tchavolo depuis une dizaine d’années ; Marie-Christine Brambilla, comédienne, auteur et interprète vient poser ses mots de poète sur 3 morceaux, ce qui apporte une respiration bienvenue au « tous cordes » ; ensuite le répertoire : sur 12 titres, 8 compos inspirées de Tchavolo, dans lesquelles il donne le meilleur de lui-même. Pour le reste, Bal, petit bal, revu et corrigé, un Brazil peut-être dispensable dans la mesure où il nuit un peu à l’unité du disque, Un beau rêve d’Automne, boléro nostalgique signé Samy Daussat pour la musique et MC Brambilla pour les paroles, qui conjugue dans sa narration fragilité et présence lumineuse, le tout ponctué de chorus de Tchavolo d’une grande sensibilité, et bien sûr, l’incontournable Nuages, dans une version d’une grande fraicheur, bien que Tchavolo ait du le jouer quelques milliers de fois ; une version qui prend tout son sens puisqu’elle s’insère dans un triptyque inspiré, qui débute avec une magnifique pièce en solo (il y en a deux autres du même calibre) empreinte de sérénité, judicieusement intitulée Mon cœur, exercice périlleux dans la grande tradition des improvisations en solo de Django, suivi de l’intense Django la périphérie des zones, hommage sensible à l’illustre manouche (le seul maitre de Tchavolo, qu’il n’oublie jamais de célébrer), proche dans l’esprit de la dernière rumba de Django des Primitifs du futur, avec un texte poétique signé Marie Christine Brambilla, qu’elle habite avec ferveur, portée par un thème lancinant et de somptueux contrechants de Tchavolo.
Lumineux de bout en bout, Tchavolo est totalement maître de son expression ; immédiatement reconnaissable, son style puissant et instinctif utilise toutes les ressources d’un instrument qu’il fait sonner comme personne, conjuguant un phénoménal coup de poignet (les notes sortent), une alternance de phrases en single notes qu’il fait régulièrement crépiter avec un sens inné de l’improvisation, composant et décomposant les différents motifs dans des variations toujours personnelles, et de jeu en accords dans des relances foudroyantes et un swing ravageur. Tchavolo c’est la guitare manouche poussée jusqu’au bout (cf Rue de l’hôtel Colbert ou le nerveux Tchavolo blues).
Ce très grand disque, peut-être le plus personnel sorti cette année dans cette esthétique très codifiée, se termine par le très apaisé Mélancolies d’un soir, somptueuse pièce en solo d’un Tchavolo habité par la musique. Respect !
1. Marie swing
2. Six heures et demie
3. Rue de l’hôtel colbert
4. Un beau rêve d’automne
5. Tango toi et moi
6. Bal petit bal
7. Tchavolo blues
8. Mon cour
9. Django, la périphérie des zones - terrain vague
10. Nuages
11. Brazil
12. Mélancolies d’un soir