Il y avait longtemps qu’on n’avait plus entendu parlé du maillorcain Biel Ballester (son dernier disque remonte à 2006). Il revient sur le devant de la scène cette année avec Avanti !, joli cd publié sur le prestigieux label Hot Club Records de Jon Larsen. Gageons que la distribution sera à la hauteur de la qualité de cet album, les disques du guitariste ibérique étant jusqu’à présent assez difficiles à se procurer en France...
Biel Ballester vient du classique. Formé par les meilleurs maîtres barcelonais de la guitare, c’est au début des années 2000 qu’il s’oriente vers le jazz manouche. Qu’il adapte à sa manière, sa musique étant toujours emprunte d’influences jazz américaines, de classique, de rythmes latino, voire de rockabilly, de pop et d’harmonies chinoises ou japonaises ! Un style qui a tout de même séduit Woody Allen qui a choisi en 2008 un de ses titres pour illustrer la BO de Vicky Cristina Barcelona...
Accompagné de son trio habituel (Graci Pedro à la rythmique et Leandro Hipaucha à la basse), Biel nous propose ici 14 superbes compositions. Dès la première écoute, on est saisi par la qualité du son de guitare : il faut dire que Biel joue sur une authentique Selmer de 1942 (une des meilleures selon Stochelo et Nous’che...) et qu’il maitrise parfaitement son affaire. Précision, attaque, placement, virtuosité au médiator et aux doigts... on reste bouche bée devant cette belle technique ! D’autant que la rythmique est à la hauteur du jeu du soliste : les bossas, pompes manouches, rumbas, boléros, tangos déroulent sans accrocs le tapis au leader et la cohésion du trio est parfaitement convaincante. Mais la technique n’est rien sans l’inspiration, et là encore, on est séduit par l’imagination et le sens musical de Biel. Sa virtuosité évidente est toujours au service de la mélodie tandis que le répertoire, très varié, fait la part belle au latin jazz alternant bossas et rumbas manouches (Avanti particulièrement enjoué, Uphill To Tibidabo, On the air, Minor Destillerie) aux boléros (Finale & Farewell tout en délicatesse) et tangos (audacieux et réussi Battersea Tango). Biel est également à l’aise sur le swing qu’il soit bluesy (Xun Shop Blues), inspiré du classique (Prelude Dancourt) ou de la country (Friendship Is The Deepest I Can Get Baby). On appréciera au passage l’audace de Tradewinds) où l’on écoute le guitariste improviser plus de six minutes sur un bourdon de ré mineur sans que l’on s’ennuie une seconde.
Pour ne rien gâcher, le trio s’est adjoint les services d’une section cuivre sur quatre titres. Les arrangements prennent alors une vraie ampleur, les cuivres ajoutant une vraie couleur aux compos de Ballester. C’est particulièrement frappant sur le très arrangé Prelude Dancourt, un des morceaux les plus réussi du disque : la reprise de la dernière ligne mélodique du soliste lors du final par la trompette de Josep Lluis Pons est de toute beauté. Effet garanti !
On ne parle pas assez de Biel Ballester...! Espérons que ce très beau disque qui sort enfin sur un label digne de ce nom donnera des idées aux organisateurs des grands festivals de l’été. La musique de Biel s’y prêterait tellement bien..
1. Uphill To Tibidabo 5:28
2. (Ted & Rodrigo) On The Air 4:58
3. Professor Persikov 4:25
4. Avanti 3:46
5. Prelude Dancourt (intro) 1:04
6. Prelude Dancourt (fuge and tutti) 4:11
7. Finale & Farewell 6:12
8. Apple Bound 2:38
9. Xun Shop Blueshop 4:27
10. Tradewinds 6:19
11. Minor Destillerie 3:56
12. Friendship Is The Deepest I Can Get Baby 2:35
13. Battersea Tango 3:20
14. When The Boys Jam In Samois 6:40
Tous les titres sont composés et arrangés par Biell Ballester. Enregistré aux Nomada 57 Studios, Barcelone, en mars et avril 2011.