A l’issue de son Point de Dépardt, premier album très convaincant et qui nous avait largement conquis, avouons qu’on était assez impatient de retrouver Dino Mehrstein.
Il nous revient cette année avec un bel album de groove et de ballade, calme et serein, toujours teinté de cette décontraction si particulière qui nous avait déjà tant séduite sur son précédent opus.
Dès la première écoute, on se dit qu’on est tout de même assez loin de Django. Bien sûr, on le retrouve dans le son des guitares quand elles sont accoustiques, dans la pompe et dans le choix de certaines reprises du génial manouche (Troublant boléro, Blues en mineur) ou jouées traditionnellement dans le style (Mack the knife, I can’t give you)... Mais leur traitement inattendu et moderne nous les fait redécouvrir sous un jour absolument nouveau : on aura ainsi la surprise d’entendre un Blues mineur commençé de façon très classiquement "plombée", s’envoler un temps vers jazz beaucoup plus aérien et délié. Pour Troublant boléro, il s’agit là carrément d’une ré-écriture très groovy et "bensonniene" avec un nouveau thème et une nouvelle rythmique. Il n’y a plus de "plans" de guitare, on joue intuitivement comme le titre de l’album nous l’annonçait. Django a bien été appris, compris, et "digéré" par le guitariste manouche !
Parmi les maîtres de Dino Mehrstein, il y a aussi les américains : et en premier lieu Georges Benson dont l’influence est impossible à occulter sur ce disque ! C’est particulièrement évident sur les morceaux joués sur archtop, surtout sur Les rendez-vous de Marcel et Pourquoi pas deux titres signés de Francko Mehrstein. La rythmique groovy et l’emploi des percussions rappèlent incroyablement le Benson de Breezin’ : d’ailleurs le thème de son Pourquoi pas doit beaucoup à Affirmation. La guitare de Dino retrouve alors (presque) la fluidité, la souplesse, la maîtrise du son d’Uncle Georges... jusque dans son côté funky et dans le blues, jamais très loin chez le guitariste américain ! Ne manque que les scats vocaux doublés à la guitare... (pour un troisième album ?) On pourra également remarqué dans le répertoire un Jazz de Pat qui en rappèle un autre, forcément : je vous laisse deviné de quel M. il s’agit... ;)
Enfin, signalons la remarquable complicité unissant les deux frangins : le travail sur la rythmique est admirable et sert réellement de moteur à Dino qui n’a plus qu’à passer les vitesses. Il y a beaucoup d’écoute, de part et d’autre : Osmose joué en duo est en cela exemplaire... et trouve son titre exact.
Dino Mehrstein et son quartet nous ont offert avec Intuitions un bel album, moderne et excitant ; ils nous confirment aussi que l’on peut jouer du jazz manouche autrement.
Un joli disque d’improvisation...
1. Au cas où (D. Mehrstein)
2. Et pourquoi (F. Mehrstein)
3. Blues en mineur (D. Reinhardt)
4. Troublant boléro (D. Reinhardt)
5. Comme une larme (F. Mehrstein)
6. Jazz de Pat... (D. Mehrstein)
7. Osmose (D. Mehrstein)
8. Stella by starlight (V. Young)
9. Note d’été (F. Mehrstein)
10. Les rendez-vous de Marcel (F. Mehrstein)
11. Mack the knife (K. Weil)
Bonus vidéo :
I can’t give you anything but love (J. McHugh/D. Fields)