Après Un pied sur l’île en 2010, cinquième album qui consacrait le retour à sa jeunesse et à ses racines corses, Rodolphe Raffalli revient cette année à ses premières amours : la chanson. Publié chez Frémeaux, Chansonnettes rappellera à beaucoup l’esprit de ses premiers disques qui rendait hommage à Georges Brassens. Le répertoire pioche en effet largement dans celui de la chanson "de qualité", voire "de patrimoine" : on pourra entendre ici de grands tubes de Trénet, d’Aznavour, de Piaf, de Ferré, de Michel Legrand et bien sûr, de Tonton Georges, autant de titres qui firent et font encore les grandes heures de la grande chanson française.

Accompagné des frères Gastine à la rythmique (Sébastien à la basse et David à la guitare d’accompagnement, parfois au chant), du pianiste Samuel Lerner sur quelques titres et de l’excellent et trop rare Félix Belleau à l’accordéon, Raffalli est en terrain connu. Cela fait longtemps qu’il joue avec ces musiciens, la cohésion du groupe est parfaite. Les interventions de Belleau sont toujours d’une grande musicalité (son accompagnement musette sur Toi tu ne ressembles à personne de Francis Lemarque est irrésistible). Raffalli est quant à lui un des grands stylistes de l’instrument : guitariste doué d’une grande sensibilité (on pense souvent à Crolla en l’écoutant), il porte toujours une attention particulière à la mélodie, et ce n’est donc pas pour rien qu’il affectionne les chansons. Il s’approprie ces airs très connus, parfois en en modifiant la rythmique initiale (la reprise des Trompettes de la renommée en bossa manouche est savoureuse), et se plait à faire "chanter" sa guitare, comme sur Trois petites notes de musique où le solo qui prolonge le thème se fredonne comme une nouvelle mélodie. On ne s’étonnera donc pas que le guitariste se plaise à reprendre le répertoire de Michel Legrand, compositeur aux mélodies imparables (I will wait for you des Parapluies de Cherbourg et Les moulins de mon cœur, oscar de la meilleure chanson du film L’affaire Thomas Crown). Jamais démonstratif, Raffalli sait faire respirer la musique, et l’étirer parfois jusqu’à l’épure comme sur Est-ce ainsi que les hommes vivent, où l’émotion devient poignante. Ce qui ne l’empêche pas de "se lâcher" sur des tempos plus rapides comme La mauvaise herbe où, passé l’intro tout en délicatesse, il prouve qu’il y en a sous le capot !
Voilà donc encore un très bon disque de Monsieur Rodolphe, et qui fera chantonner sous la douche !