Parfaitement inconnu dans nos contrées, Gonzalo Bergara est pourtant l’un des tout premier représentant de la guitare manouche outre atlantique, aux côtés de Stéphane Wrembel, Kruno Spisic et John Jorgenson.
Leader de sa propre formation, il est aussi le sideman attitré de Jorgenson (cf son dernier album : Ultraspontane bientôt chroniqué ici même...), et on a même pu l’entendre récemment aligner de jolis contre-chants sur la reprise d’"Il est cinq heures, Paris s’éveille" chantée par... Sylvie Vartan !
A ce jour, il n’avait produit aucun album. C’est maintenant chose faite avec ce superbe "Porteña Soledad" autoproduit (et encore en cours de pressage... on vous tiendra au courant !) qui on l’espère lui apportera la reconnaissance mondiale qu’il mérite. Car cet album est superbe. D’abord parce que Gonzalo Bergara possède une technique exceptionnelle, précise et qu’il sait en user à bon escient, sans encombrer sa musique de démonstrations pyrotechniques stériles. Et ensuite parce que sur les dix titres de cet album, il nous propose neuf compositions, toutes plus belles les unes que les autres. Bien sûr, il y a du swing classique avec B-612, Meatwad’s revenge, la reprise enlevée de Some of these days, ou encore l’hommage bleuté à Charlie Parker Blues for Charlie ; Bergara joue ce swing avec un enthousiasme permanent et une jubilation communicative. Mais la vraie originalité de sa musique se situe surtout dans son côté "latino" et la passion qu’il véhicule. Bergara est argentin, et cela se sent. Dans les bossas manouches évidemment, qu’elles soient enjouées (Agridulce) ou dramatiques (Elena’s bossa), mais plus encore dans les titres à la nostalgie et à la mélancolie poignante comme Como una flor (qui rappelle un peu le Cuba du Buena Vista Social Club...), Porteña Soledad et son superbe bandoneon nous renvoyant tout droit à Piazolla, et surtout le magnifique Insulto et son introduction mêlant génialement un piano bastringue (évoquant Ruben Gonzales... encore) au discours populiste de Lou Dobbs (CNN) rageant contre la porosité de la frontière mexicaine... Cette incursion engagée du politique dans un swing manouche joué par un argentin vivant aux Etats Unis est du plus bel effet...
Porteña Soledad est un vrai beau disque, cohérent et sensible, qui en plus de vous faire taper du pied... vous retourne les tripes.
1. B-612 (G. Bergara)
2. Insulto (G. Bergara)
3. Elena’s bossa (G. Bergara)
4. Como una flor (G. Bergara)
5. Meatwad’s revenge (G. Bergara)
6. Some of these days (S. Brooks)
7. Blues for Charlie (G. Bergara)
8. Charcos (G. Bergara)
9. Agridulce (G. Bergara)
10. Porteña soledad (G. Bergara)
Enregistré en 2007 aux Etats Unis.
A lire également la chronique d’Ezrite, un élève américain de Bergara sur le forum de Djangobooks.com.