Plus qu’un « vrai » disque (pochette cartonnée minimum), » clasico » est avant tout la fixation, non pas dans la cire mais sur CD, d’une jam session de luxe entre deux gachettes de la guitare manouche, qui croisent régulièrement les cordes ici(Samois) ou là (Djangofest) ; les thèmes des 13 titres de Django ou de son répertoire(les compositeurs ne sont pas crédités !, )qu’ils ont du jouer des centaines de fois, deviennent le support de longs échanges spectaculaires, ces deux killers aux doigts qui les démangent, privilégiant bien sûr les tempo rapides (Appel indirect, Coquette, Django’s tiger…).

Jérémie Arranger tient la contrebasse, soutenu rythmiquement par celui des deux qui n’est pas à la manœuvre ; Adrien Moignard (canal gauche) envoie de longues phrases souvent froides et mécaniques, égrenant des grappes de notes façon guitare mitraillette ; même si le phrasé de Gonzalo Bergara (canal droit) est plus chantant et plus inventif, le guitariste argentin ne peut éviter la compétition sportive avec son petit camarade et montrer qu’il a aussi des doigts ; on frise alors souvent l’overdose. (cf le déluge de notes sur Belleville, pris à une vitesse telle que ça n’a plus de sens). Les morceaux les plus supportables sont ceux où la musique respire un peu (Dream of you, Troublant boléro…). Il faut sacrément être ébloui par la technique indiscutable de ces deux guitaristes pour écouter les 13 titres d’affilée.

(Ré)écoutez donc ce même répertoire par Django Reinhardt et vous comprendrez je pense ce que je veux dire ; i’ll see you in my dreams par exemple ; alors que l’illustre manouche déroule un long solo dont la construction et le développement atteignent la quasi perfection, elle devient ici un prétexte à souvent mouliner dans le vide ; c’est toute la différence entre le génie et l’exhibition technique !