Après avoir enregistré un premier disque à trois leaders en 2004 aux côtés de Noé Reinhardt et de Samy Daussat, puis avoir tourné avec Christian Escoudé et Jean-Baptiste Laya au sein du Nouveau Trio Gitan, David Reinhardt a repris cette année le chemin des studios pour enregistré The way of heart, premier album de son nouveau trio.
Entouré d’un excellent batteur, Yoann Serra et d’un joueur de B-3 tout aussi doué, Florent Gac, David Reinhardt nous livre avec cette formule novatrice un magnifique album à mille lieues des manoucheries à la mode et des virtuosités guitaristiques habituelles auxquelles on aurait pu le croire destiné. Avec une sonorité incandescente et personnelle, émancipée de celle de Babik dont il joue toujours la Gibson 175, David a choisi d’emprunter le difficile chemin de la musicalité et du phrasé. Economie d’effets et de notes, construction des chorus, écoute active de ses partenaires, sens de la mélodie et articulation du phrasé... on est impressionné par la rapidité des progrès de jeune guitariste de 22 ans. En revanche, en bon jazzman qu’il est déjà, on est moins surpris de la volontaire et pertinente pondération de ses interventions au profit de l’harmonie d’un trio à la remarquable cohésion. L’essentiel Florent Gac distille, lui aussi, ses accords et ses lignes de basse avec une même et généreuse retenue, tandis que l’impressionnant Yoann Serra sculpte avec une étonnante musicalité l’espace sonore. Ces trois là font du jazz... pas de doute !
Le choix du répertoire, éclectique, en dit d’ailleurs long sur les influences du jeune musicien : deux compositions de David (Bras groove, The way of Heart avec Sébastien Giniaux) et une de Florent Gac (Sponge bop) côtoient René Thomas (Theme for Emmanuel), Stevie Wonder (Mon blue), Kenny Burrell (Lyresto), Nelson Cavaquinho (Beija Flor), Henri "Ding" Adel, (gendre de Joseph Reinhardt) pour l’étonnante Trouvaille, et Wojciech Kilar pour le splendide thème Love remembered du Dracula de Coppola...
Enfin, trois invités et amis (de Samois et d’ailleurs...) viennent concourir à la réussite de l’album en apportant chacun une couleur personnelle : du bop pur et dur avec le solide Olivier Témime au ténor, de la sensualité avec la chanteuse Cyrille Aimée (troublant Moon blue...), et de l’impressionnisme avec l’excellent Sébastien Giniaux ici au violoncelle.
Sorti en septembre dernier hélas dans une relative discrétion, The Way of Heart nous confirme en tout point le talent de David Reinhardt. Celui d’un artiste original, sensible, intelligent... et résolu.